J’ai beaucoup de chose à dire sur la couture de l’Overland Cloak de Twig + Tale. Ce n’est pas juste une cape, façon déguisement. C’est un vrai manteau d’hiver. Si on le réalise dans les bonnes matières, il fera des merveilles contre les vents et le froid de l’hiver. Et il m’a donné un peu de fil à retordre.
Participer à un « Sew + Show »
Mais avant tout, les mentions d’usage : Twig + Tale m’a offert le patron de cette cape. J’ai de nouveau participé à leur groupe « Sew + Show ». Il y a plusieurs étapes dans la vie d’un patron de couture. Après avoir été conçu et dessiné, il faut le tester, pour vérifier que le vêtement final tombe correctement. T+T paye des testeurs pour cette étape-là : ce sont des couturières qui réalisent plusieurs versions du vêtement. On attend d’elles des retours détaillés, pour améliorer tout ce qui peut l’être. Ça permet aussi de s’assurer que toutes les tailles comprises dans le patrons fonctionnent bien, sur des morphologies différentes.
Le « Sew + Show », c’est l’étape d’après. La marque nous demande de réaliser la couture de l’Overland Cloak dans un temps imparti et de réaliser des photos, qui lui serviront aussi bien à illustrer le tutoriel qui accompagne le patron qu’à communiquer sur les réseaux sociaux au moment de la sortie officielle du patron. T+T nous offre également un autre patron de leur collection, selon notre choix. Ce sont les seules contreparties. L’achat du tissu et des fournitures, c’était pour moi. Je le précise, car cet article n’est pas de la pub. En cousant la cape et en envoyant des photos à T+T, j’ai rempli ma part du contrat. Elles ne nous demandent pas de communiquer, de faire la promotion du patron ni de la marque. Tout ce qui suit est donc une opinion 100% sincère.
À noter que si vous avez envie d’y participer, pour de futurs patrons, il suffit de suivre Twig + Tale sur les réseaux sociaux : elles annoncent les patrons à « tester » et font des appels à candidature. La seule condition est de parler un minimum anglais, car le tutoriel est en anglais. Il est toutefois accompagné de vidéos, donc c’est très abordable. Voilà pour le disclaimer. Autant le savoir : cet article sera long !
Coudre le Overland Cloak : un apprentissage de la patience
Un ébéniste dont j’aime beaucoup le travail a dit un jour dans une vidéo qu’on lui posait souvent la même question : quelle est sa partie préférée dans le travail du bois ? Il n’avait pas de réponse satisfaisante à apporter car, dit-il, les étapes sont toutes aussi pénibles les unes que les autres. Pourtant, il adore l’ébénisterie.
C’est un peu pareil pour la couture. Je déteste couper les patrons papiers. Je n’aime pas couper le tissu, je me fais souvent mal au dos. Préparer le tissu en le lavant et en le repassant, c’est rasoir. Même la partie couture à proprement parler me casse souvent les pieds : il faut mettre une tonne d’épingles, le tissu bouge quand même, les fils s’emmêlent, la machine rouspète, le tissu gondole alors qu’il ne devrait pas… Quand je couds, il y a mille et une petites choses qui me font râler et qui m’agacent. En même temps, et sans le moindre paradoxe, j’adore coudre. C’est un puzzle en 3D qui me demande de l’attention et de la concentration, tout en me permettant de déconnecter de tous les sujets d’inquiétude qui m’accompagnent au quotidien. En apprenant la couture, j’ai compris pourquoi autant de gens font une activité manuelle, quelle qu’elle soit.
Ce projet est un très bon exemple de tout ça. Il m’a stressé, agacé, inquiété. Je voulais bien faire, dans le temps imparti, c’est-à-dire deux semaines. Je me suis mis une grosse pression pour la couture de l’Overland Cloak, je ne sais pas trop pourquoi. C’était aussi une formidable expérience. On pourrait croire que coudre une cape est relativement facile, puisqu’il n’y a pas de manches et que c’est ample. Sans être incroyablement compliqué, c’est quand même l’un des projets couture qui m’aura demandé le plus de concentration.
Il y a quelques points négatifs, par exemple certaines pièces du patron papier sont à double emploi : elles servent pour le tissu extérieur et la doublure, il faut alors couper une partie ou plier le patron. J’ai horreur de ces choses-là. Je trouve aussi la capuche un peu trop petite. Celle que vous voyez sur les photos, c’est déjà un hack : au cours du Sew + Show, une participante a demandé si on pouvait modifier la capuche pour l’agrandir. L’équipe de T+T a aimé l’idée et nous a proposé une manière de faire une capuche plus grande. C’est ce que j’ai choisi et pourtant je la trouve encore un poil petite.
Le tissu extérieur et la doublure ne sont pas attachés au bas de la cape. Ça peut sembler contre-intuitif, mais c’est une technique utilisée par exemple au Japon, pour les manteaux, m’a dit une collègue très bonne couturière. Il suffit de faire quelques points dans les marges de coutures et les deux tissus bougent ensemble quand même. Ne pas attacher, en bas, la doublure au tissu extérieur permet de laisser une petite marge de manoeuvre : si les deux tissus ne sont pas coupés parfaitement et qu’ils sont assemblés, ils risquent de vriller un peu, ce qui est moins joli (et franchement agaçant quand on essaie de tout aligner). D’ailleurs, T+T recommande, une fois que l’on a fait les premières étapes de l’assemblage, de laisser le tissu « reposer » sur un cintre. S’il s’étire pendant ces 24-48h de repos, il faut alors recouper.
Heureusement, mon tissu n’a quasiment pas bougé. Il y avait déjà bien assez de boulot comme ça ! J’ai du par exemple faire mes boutonnières à la main, ma machine n’a pas réussi à passer toutes les épaisseurs de tissu ! J’étais soulagée de n’avoir que deux boutonnières à faire, ça m’a tout de même pris plusieurs heures ! J’ai aussi terminé l’ourlet à la main. Jamais je n’ai autant cousu à la main pour un projet !
Pour le reste, je n’ai que du positif. Comme toujours avec Twig + Tale, c’est un patron amusant et intéressant à coudre, les explications sont limpides, il y a un tutoriel vidéo et le résultat est tel que je le rêvais. Et en bonus : il y a des poches dans la doublure ! Je pense porter le Overland Cloak très souvent cet hiver. Bon, peut-être pas pour aller faire des courses au supermarché, je ne passe pas franchement inaperçue avec cette immense cape jaune moutarde !
Les tissus
Pour ce projet, je voulais un beau tissu. Quelque chose qui soit à la hauteur de ce patron. Trouver des lainages en 100% laine est difficile, en France. Dans les magasins comme sur internet, je trouve, au mieux, des mélanges de laine et de synthétique. Je déteste le synthétique. C’est donc une source de frustration régulière : quand je veux un lainage, je trouve rarement mon bonheur en France. C’est là que je suis tombée sur le site de Fabworks, grâce au blog I Sew Therefor I am. Je me suis dit deux choses en même temps : « oh mon dieu le paradis du lainage ! » et « enfer et damnation je vais finir interdit bancaire ».
Ils se présentent comme une entreprise familiale. Fabworks est basée en Angleterre, dans la région du West Yorkshire, à côté de Manchester. C’est une région avec une riche histoire autour de l’industrie de la laine, qui a compté de nombreuses usines textiles, dont la majorité ont aujourd’hui disparu. Fabworks vend notamment de la laine produite dans le coin.
J’ai craqué pour un twill de laine jaune moutarde, ma couleur préférée. Le twill est un tissage serré, ce qui permet d’avoir un tissu qui se tient très bien et qui a un beau drapé. Je n’ai jamais cousu un tissu d’une telle qualité. Il ne s’effiloche pas, il a un magnifique tombé, il ne se déforme pas. J’ai aussi pris un tissu pour la doublure. Là encore, je suis souvent frustrée par l’offre des enseignes françaises, que je trouve assez pauvre et d’une qualité moyenne. Les doublures chez Fabworks sont magnifiques. J’avais envie de tout acheter. Bon, par contre, c’est du synthétique. Difficile de faire autrement quand il s’agit de doublure, à moins de prendre une soie ou un satin.
Là où le bât-blesse… c’est le prix. La laine coûte pas loin de 26 euros du mètres, ce qui est correct pour une laine de cette qualité, mais ça reste un sacré budget. La doublure coûtait 8 euros du mètres. Il faut ajouter l’expédition (environ 40 euros) et surtout les droits de douanes, qui s’appliquent depuis le Brexit. J’en ai eu pour 90 euros. Ça pique. Je ne commanderai clairement pas très souvent chez Fabworks, car la facture s’alourdit très vite à cause des frais de douanes et de l’expédition. C’est bien dommage, parce qu’ils ont des tissus de superbe qualité. J’ai aussi commandé un lin et je ne cesse de m’émerveiller à chaque fois que je le touche. Pour ne rien gâcher, leur service client est très réactif et très sympa.
Au final, la couture de l’Overland Cloak aura été une belle expérience, qui m’a appris la patience et qui m’a donné envie de faire attention à chaque détail et à chaque finition. Je porterai la cape souvent, dès qu’il fera froid. J’aimerais en faire au moins une autre, mais ça attendra. Il me faut un projet plus simple, pour me remettre de mes émotions !
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[…] je n’avais pas participé à ce « Sew + Show » (j’ai détaillé le fonctionnement dans cet article), la Plains Dress aurait fini sur cette liste et il m’aurait sans doute fallu des années […]