Je dirai même plus : le roadtrip de la grosse lose.
Ça fait une éternité que je dois mettre cet article en ligne, alors débutons par un petit « dans les épisodes précédents… » C’était en novembre dernier. À ce moment-là, je suis épuisée par le boulot. J’ai l’impression que la dernière fois que j’ai pris des vacances, Chirac était encore président. La simple pensée qu’il faut se lever pour aller travailler me donne envie de construire un bunker autour de mon lit.
Autrement dit, il devenait urgent de s’évader… et en même temps, tous les ingrédients étaient réuni pour une magistrale plantade : fatigue, préparation minimale et pas envie de faire des efforts. Je rêvais depuis longtemps de me balader en Italie du Nord, j’ai donc assuré le minimum : vérification de l’état de la voiture, choix sommaire des étapes à ne pas louper, appareil photo, ordi et l’équivalent de cinq jours de vêtements dans un sac.
De Nice à La Spezia
Résultat, ce matin d’automne, vers 6h, j’envoie un texto à mes proches (« off pendant dix jours »), je jète un sac sur le siège passager et je roule en direction de la frontière italienne. Quand le jour commence à se pointer, je suis au niveau de Bordighera. Mini-pause sur un parking, entourée de camion, dont les chauffeurs commencent à se réveiller et à faire le café. Ils ont bien choisi leur place, le parking offre une vue trois étoiles sur la ville, en bord de mer.
Retour sur la route. Je snobe complètement Imperia et Gênes, que j’avais déjà visités le temps d’un weekend, quand je venais de déménager à Nice. Très franchement, je n’avais pas été émerveillée par Gênes, même si c’était plutôt joli. Par contre, je recommande chaudement Imperia, vraiment très agréable.
La route devient monotone un peu avant Gènes. Cet autoroute est pratique, mais comme elle passe par les hauteurs, il a fallu creuser la montagne et les tunnels se suivent les uns après les autres. J’essaie d’écouter la radio italienne. Je devine que les infos se concentrent les tremblements de terre à répétition dans le centre du pays. Ça me rappelle les parents et les amis qui s’alarment de mon voyage alors que mon itinéraire passe à des centaines de kilomètres. C’est comme si je conseillais à un ami d’éviter Nice à cause des règlements de comptes à répétition qui ont lieu à Marseille. Bref, pour la dernière heure de route, je m’ennuie et la fatigue commence à se faire sentir.
Les Cinque Terre
Arrivée à La Spezia, première étape du voyage. C’est mignon. La Spezia est le port d’attache quand on veut visiter les Cinque Terre sans se ruiner.
Première galère : se garer. J’avais repéré un parking gratuit sur Internet, sauf qu’il a été pris d’assaut et je suis obligée de tourner dans la ville pendant 15 minutes avant de trouver une place.
Direction la gare. 20 Minutes à pied depuis ma voiture, parfait pour se réveiller, à la faveur de l’air frais du matin. J’observe les gens dans la rue. Qui sont les touristes et qui sont les locaux ? Ceux qui portent des shorts et des débardeurs sont faciles à classer : touristes du Nord de l’Europe ! Moi je vis à Nice, quand il fait 18 degrés, je porte une veste ! Et d’ailleurs, c’est à ça qu’on reconnaît les locaux.
Galère n°2 : prendre un billet de train pour les différents villages. Les files d’attentes s’entortillent et se mélangent au sein de la gare. C’est presque une pièce comique, avec plein de personnages : les Italiens habitués et pas du tout déstabilisés par ce joyeux bordel ; les Français qui râlent à voix haute, comme si personne ne les comprenaient ; les Coréens, en couple, qui cherchent à comprendre le fonctionnement de la queue ; les Russes, qui râlent à voix haute, mais eux on ne les comprend pas ; les Japonais, en groupe, qui tentent de cacher leur ahurissement devant cette cacophonie dont ils n’ont pas l’habitude ; les Américains, qui parlent à voix haute, et on comprends un mot sur deux. Cette gare était un voyage à elle toute seule.
Sauf qu’il est déjà 10:30 et j’espérais être à Riomaggiore à cette heure-ci, mais tant pis. Le maître-mot de ce voyage est : profiter. Je me détends.
Dans le train. Une horde de touristes chinois, très, très, TRÈS bruyant. Encore un tunnel. Soudain, on sort à l’air libre, la vue de dégage sur le bleu azur de la Méditerranée. Pendant une seconde, le silence… puis tous laissent échapper un « aaah » de surprise ravie.
L’article sur les Cinque Terre, si vous avez envie de le (re)lire
Manarola, Riomaggiore, Vernazza. Je décide de ne visiter que trois des cinq villages des Cinque Terre. Je repars éblouie par la beauté de ces villages colorés, qui s’accroche au flanc des criques et qui se jettent dans l’eau transparente de la Méditerranée. Seul défaut : beaucoup, beaucoup trop de touristes. La foule est parfois si nombreuse que j’avais l’impression d’être dans un village témoin, comme si le vrai village était installé autre part, caché aux touristes.
De La Spezia à Venise, en passant par Bologne
Départ tôt le matin. Je voudrais arriver à Venise le plus vite possible, pour profiter de cette ville qui me fascine depuis déjà plusieurs années. Pour faire la route, deux options : l’autoroute qui transite par Parme et Bologne, ou les routes nationales. Je choisis la première. Quand j’arrive au niveau de Bologne, il est environ 11h. Pourquoi ne pas s’arrêter pour le déjeuner ? On m’a déjà recommandé plusieurs fois la ville. Je finis par arriver au centre ville et par dénicher une place de parking.
A ce propos : ne vous garez pas dans le centre historique de Bologne ! La circulation y est normalement interdite si l’on n’y habite pas. Je l’ignorais et c’est au moment de payer le parking que l’employée m’a facturé une sorte de taxe supplémentaire et m’a fait remplir un document pour éviter que je ne prenne une amende. Le centre est de petite taille, le mieux est de laisser la voiture sur l’un des boulevards qui l’entoure et de marcher.
Bologne a été un petit coup de coeur. Pas un coup de foudre, mais une étincelle qui donne envie de revenir. Dans le centre, près de la place des deux tours et de l’église, il y a la Basilique Santo Stefano. On peut visiter ce qui ressemble à un ancien monastère, aux briques ocres, comme dans une bonne partie du centre historique. C’était touristique, mais pas envahi non plus. Les visiteurs étaient plutôt calmes, je me suis promenée tranquillement, j’ai pris le temps de faire des photos, de m’asseoir sur un banc pour regarder passer les gens… après tout, le concept du slow travel est né en Italie !
Venise
Venise ! Enfin, presque. Venise est divisée entre l’île que tout le monde connaît, sur la lagune, et la partie terrestre, qui s’appelle Mestre. Mestre n’a aucun intérêt, si ce n’est pour y loger, si vous souhaitez économiser sur le logement (ce qui, à la haute saison, risque de ne pas tellement être un choix, tant les hôtels sont hors de prix sur la lagune).
Pour la voiture, il y avait deux options : se garer à Mestre, la partie continentale de Venise, et traverser la lagune en train ; ou rouler jusqu’à l’île de Venise et se garer sur le seul parking et le seul endroit où l’on trouve des voitures. Bien sûr, la seconde option était plus cher. Nettement plus cher. J’ai donc choisi la première option. Le ticket de train pour rejoindre Venise ne coûte que 1,25€. N’oubliez pas de ponctionner votre ticket, comme en France, sous peine d’amende ! Vu le prix, ce serait idiot.
Quand je suis revenue sur Mestre, très mauvaise surprise : j’ai mal calculé le coup du parking. J’ignore comment j’ai fait mon compte, si j’aurais du payer en avance ou prendre un ticket spécial… le résultat, c’est qu’à une quinzaine d’euros près, ça m’a coûté aussi cher que si j’avais choisi le parking à Venise. Frustration intense.
Une grosse partie de mes déconvenues pendant ce voyage auront été liées à la voiture, en particulier au parking. Je n’ai pas regretté avoir choisi de rouler, c’était vraiment agréable d’être libre de mes mouvements et de ne pas perdre du temps dans les halls de gares et d’aéroports, mais ça m’a clairement coûté plus d’argent.
Fin de la parenthèse vroum-vroum.
Il fait quasiment nuit quand j’arrive enfin au coeur de Venise. Je grimpe dans un vaporetto, descend à l’arrêt du pont Rialto. Et là, l’une de mes plus belles frayeurs de voyage : impossible de trouver l’hôtel. Je vérifie le plan fourni lors de la réservation. Je rallume mon portable pour me localiser. J’inspecte chaque devanture de la rue. Rien. Maintenant, il fait tout à fait nuit, il fait froid, je commence à m’inquiéter sérieusement. Je relis pour la énième fois ma réservation… quand je repère, en toute petites lettres, qu’il faut s’adresser à la réception d’un autre hôtel qui me donnera les clefs ! Soulagement, 15 minutes plus tard je suis dans ma chambre, 10 minutes de plus et je suis de nouveau dans la rue, appareil photo au point, emmitouflée dans un pull et un manteau.
L’article sur Venise, c’est par là !
Au final, comme je vous l’ai dit dans l’article où je détaille cette étape, Venise aura été la plus belle découverte du voyage. J’avais peur que la réputation ait dépassée la réalité, que la ville ne soit pas aussi belle que le promettent les guides de voyages et les spots publicitaires. Je connais d’ailleurs des gens qui ont été déçus de Venise, qui n’ont rien ressenti. Personnellement, j’ai été envoûtée dès l’instant où je suis sortie de la gare et où le vaporetto m’a emporté sur le Canal Grande.
Où prendre des photos à Venise ? Quelques réponses ici
Prochain rêve, pour Venise : y aller pour l’intégralité du mois de février, pour voir la ville avant, pendant et après le carnaval.
En Avant Milan
À partir de ce moment-là, le voyage se corse. J’étais partie de Nice avec un rhume carabiné, le genre où il vaut mieux rester chez soi, sous la couette, avec n’importe quelle boisson chaude. Sauf que je n’allais pas renoncer pour un rhume ! La première semaine, j’ai survécu. Dès que j’ai quitté Venise, après 8 jours de voyage, mon corps (et mes anticorps) s’est vengé. Pic de fièvre, gorge en feu, maux de crâne, nausées… Le grand chelem. Si on ajoute une météo froide et pluvieuse, ça fait une superbe combo pour un voyage loupé.
Bref, je quitte Venise, la tête déjà dans les choux. J’ignore royalement le Lac de Garde et Vérone, par pure flemme. Vers midi, je fait étape au Lac d’Iseo. C’est mignon. Cela le serait encore plus avec un peu de soleil, voire quelques degrés supplémentaires. Là, je deviens bougon.
Pourquoi est-ce que j’ai passé un sale moment à Milan ?
Je vous l’ai dit la semaine dernière : j’ai failli détester Milan. Je réserve mon jugement final après une potentielle deuxième visite. En revanche, c’est clairement à ce moment-là que le roadtrip a commencé à mériter réellement son nom « de la lose ». Je ne vais pas m’étendre sur cette partie, j’ai déjà tout expliqué dans l’article dédié.
Fin du voyage en passant par le Lac Majeur
Je quitte Milan entre le dépit et la fatigue. Mon rhume commence à tenir plus de la pneumonie que du rétrovirus classique. J’avais prévu de passer trois jours au bord du Lac Majeur et d’en faire un article à part entière. Finalement, quand une gastro a débarqué en renfort, j’ai abandonné et je suis rentrée à Nice.
C’est le moment où j’ai décidé de titrer cet article : « le road trip de la lose ». Pourtant, en arrivant à Stresa, un peu échaudée de mon expérience milanaise, j’étais prête à PO-SI-TI-VER ! Une mauvaise étape n’équivaut pas à un voyage loupé. D’ailleurs, mes premiers pas dans la ville, en fin d’après-midi, sont encourageants : Stresa ressemble à ces stations balnéaires un peu bloquées dans le passé, avec une architecture qui ne dépareillerait pas dans un film des années 1950 et une ambiance détendue, très loin de la frénésie des Cinque Terre, de Venise et de Milan. Là, ça sent les vacances !
Pour les deux prochains jours, j’ai prévu de me balader et surtout d’aller visiter les Borromées, trois îles posées sur le lac, aussi jolies que différentes d’après les images sur Internet. Il existe même un service qui allie la navette sur le lac et un tour en train dans les hauteurs. Sauf qu’en entrant dans l’office du tourisme… on m’explique que, pendant la basse saison, rien ne marche. Les trois îles sont fermées au public, les bateaux ne circulent plus, les trains non plus. A Stresa même ? Les quelques points d’intérêts ont fermé leurs portes jusqu’en mars prochain. Même certains hôtels cessent d’accepter des clients pendant l’automne et l’hiver. Il y a bien quelque chose à faire ? Des visites ? Des villages ? Des randonnées ? Rien, me répond la dame de l’office de tourisme, qui a l’air de penser que je suis quand même un peu stupide de me pointer ici en plein mois de novembre. Oui, bon, on ne choisit pas toujours les dates de ses vacances…
J’ai donc quitté Stresa en avance, mais sans regret. J’espère bien avec l’occasion de refaire une petite excursion d’un weekend, depuis Nice, quand j’aurais le temps !
Au final, toutes ces mésaventures ne sont pas graves, pour au moins trois raisons.
D’abord, rien n’est grave (sauf le Bordeaux), ce ne sont que des vacances !
Deuxièmement, parce que c’est aussi ça, la liberté que l’on ressent en vacance. Rien ne se passe comme prévu, ras le bol, envie de rentrer ? Rentrons ! On n’est pas au travail, où il faut terminer ses tâches, sinon il y aura des conséquences. Alors, oui, ce n’est pas ce que j’avais prévu, mais j’ai fait uniquement ce que j’avais envie de faire.
Troisièmement, et c’est la raison la plus importante, j’en ai marre des voyages parfaits. Avec les Instagram, Facebook et les blogs voyages, on a vraiment amplifié le syndrome du guide du routard : on vous donne les clefs pour que tout soit parfait. Il faut dénicher le meilleur restaurant, mais c’est mieux si l’adresse est confidentielle. Il faut vivre les aventures les plus folles, rencontrer les autochtones les plus authentiques, découvrir les lieux les plus magiques… Tout en restant simple. Il faut vivre une expérience digne de National Geographic, sinon on a loupé nos vacances. C’est en tout cas l’impression que j’ai parfois quand je lis certains blogs voyages (que j’adore pourtant et qui remplissent parfaitement leur fonction de me faire voyager depuis mon canapé !).
Sauf que ce roadtrip de la lose m’a rappelé que ce n’était pas grave de louper un voyage. D’ailleurs, la déception n’a pas duré longtemps et c’est sans doute pour ça que j’ai mis du temps à rédiger cet article. Alors je me suis posé la question : si c’est pas pour vous dire à quel point mon séjour était merveilleux, est-ce que ça vaut vraiment la peine d’écrire ? Et bien oui ! Pour vous et me rappeler qu’un voyage pourri, ça reste un moment d’émotions et de souvenirs.
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2 Comments
Article très intéressant pour nous qui préparons nos vacances dans les mêmes conditions et villes que toi 🙂
Petite question tout de même : as tu dormi uniquement à l’hôtel ? Car dans notre cas, nous partons avec la tente dans la voiture pour se trouver des petits campings au fil de la route.
En tour cas, merci pour cet article !
(et pour info, on dit « loose » et non « lose » )
Merci Julie 🙂 Alors oui, que de l’hôtel, parce qu’en bonne tête en l’air que je suis… j’ai laissé la tente à la maison ! Et comme, en plus, j’étais crevée, j’ai pas fait dans la dentelle ! Mais en camping, c’est plus sympa 🙂 Dans la région des lacs, c’est probablement la partie la plus agréable pour le camping, il y a plein de balades possible ! Par contre, pour Venise, j’ai pas regretté de prendre l’hôtel. Même si l’aller-retour entre l’île et le continent ne coûte vraiment rien et ne prend pas longtemps, pouvoir déambuler et profiter de l’ambiance, en pleine nuit, ça a été l’un de mes meilleurs souvenirs de Venise. Si c’était à refaire, je privilégierais les campings pour l’intégralité du voyage, à l’exception de Venise.
Profitez bien de votre voyage, j’ai hâte de vous lire sur votre blog 😀
(par contre, on dit bien la « lose », « loose », en anglais, ça veut dire « en vrac » ou « mal serré » ;))